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que, non content d’étudier avec le plus grand zèle l’histoire et le droit, Kapelle, élève de ce savant, avait appris la langue arabe en quatre mois, dans les heures de récréation. Au sortir des études, il visita différentes contrées, et particulièrement la France, où il demeura quelques années. En 1624, il fut reçu dans l’ordre équestre du comté de Zutphen, qui le nomma successivement député de la chambre des comptes, et juge du district de Dœsbourg, etc. En 1676, il épousa la fille d’un gentilhomme qui lui apporta en dot la seigneurie d’Aartsbergen, dont il porta dès lors le titre. Les troubles auxquels la Hollande fut en proie dans les années suivantes lui donnèrent l’occasion de développer ses talents politiques. Lié d’amitié avec le prince Guillaume, il lui parlait avec franchise, et blâmait souvent la témérité de ses entreprises. Effrayée de la masse des dettes nationales, la province de Hollande avait résolu de diminuer l’armée ; le prince Guillaume II et les états des autres provinces s’opposèrent vigoureusement à cette mesure. Aartsbergen fut l’âme de ce parti. Dans un manifeste adressé à la ville de Dordrecht, il exhorta avec énergie les Hollandais à se réunir sous la direction du prince Guillaume, auquel ils devaient leur liberté. Des manifestes semblables furent adressés à d’autres villes ; mais Dordrecht n’en cessa pas moins de payer la solde des troupes. Aartsbergen publia alors un autre mémoire pour engager cette ville à ne pas se séparer de l’union. Wagenaar et d’autres historiens hollandais l’accusent de n’avoir été qu’un aveugle partisan du prince Guillaume, et de lui avoir donné de pernicieux conseils, entre autres celui d’arrêter les membres des états qui s’opposaient à ses projets. Il a réfute lui-même une partie de ces accusations dans ses mémoires, publiés en 1778, 2 vol. in-8o, par son petit-fils Rob. Gaspard van der Kapelle, qui a accompagné l’ouvrage d’une longue préface apologétique. Aartsbergen est mort à Dordrecht, en 1656. D-g.


AARTSEN (Pierre), peintre hollandais, appelé communément Lange Pier, Long-Pierre, à cause de sa grande taille, naquit à Amsterdam, l’an 1507. Placé de bonne heure dans l’atelier d’Allart Klaassen, qui était alors un des plus fameux peintres de cette ville, il se fortifia sous sa direction, et s’accoutuma surtout à mettre beaucoup de réflexion et de patience dans son travail. À l’âge de dix-sept ans, il se rendit à Anvers, où il perfectionna sa manière, chez Jean Mandyn, qui imitait avec succès le genre de Jérôme Bos : il fut admis, en 1533, dans la maîtrise des peintres anversois. Il peignit le plus souvent des objets peu élevés, tels que l’intérieur d’une cuisine, des mets, et autres objets semblables qu’il savait grouper avec art, et qu’il représentait avec tant de vérité, que peu de peintres ont pu l’égaler dans ce genre. Il peignit cependant aussi plusieurs sujets religieux pour les églises d’Amsterdam, Louvain et autres ; mais il eut la douleur de voir détruire ces tableaux, en 1566, par suite des troubles religieux. Aartsen soignait moins les tableaux d’une petite dimension que les grands ; la perspective et l’architecture lui étaient très-familière ; il se plaisait aussi à représenter des animaux, dont le coloris varié produisait un très-bon effet. Il vendit ses ouvrages à bas prix, et s’occupa fort peu de sa fortune. Il mourut dans sa ville natale, en 1573, et fut enseveli dans l’église dite Oudckerk, auprès du chœur, où on fit encore son épitaphe. D-g.


ABA, ou OWON, roi de Hongrie, épousa la sœur de St. Étienne, premier roi chrétien de ce royaume, et fut exilé par Pierre, surnommé l’Allemand, neveu et successeur de ce prince, qui, s’étant attiré la haine de ses sujets, ne voyait dans Aba qu’un rival dangereux. En effet, Aba étant venu se mettre à la tête des mécontents, fit déposer Pierre, et fut élu roi à sa place ; en 1041. Mais il ne répondit point à l’attente de la nation hongroise. Se croyant affermi sur le trône, il montra les mêmes vices qui avaient occasionné la chute de son prédécesseur. Les Hongrois, irrités, appelèrent l’empereur Henri III, qui fit des préparatifs pour aider Pierre à remonter sur le trône. Aba, voulant prévenir l’empereur, fit une irruption en Bavière et en Autriche, qu’il ravagea. Il revint avec un riche butin ; mais, l’année suivante, il fut obligé de restituer ce qu’il avait pris, et en outre de payer une somme considérable pour se soustraire à l’attaque dont il était encore menacée de la part de l’empereur. Se croyant alors affermi sur le trône, il devint cruel et fit mourir cinquante nobles, accusés d’avoir conspiré contre lui. La haine de la noblesse envers lui fut encore augmentée par la familiarité qu’Aba accordait aux gens de la plus basse classe du peuple, qu’il admettait souvent à sa table. Les nobles fugitifs, aidés par l’empereur et par le marquis de Moravie, se révoltèrent contre Aba. L’empereur, appelé de nouveau par les mécontents, entra en Hongrie, et, après trois campagnes consécutives, il défit, le 3 juin 1044, près de la Theiss, les troupes d’Aba, qui prit la fuite, et fut arrêté presque aussitôt près de Tibisc, et amené au roi Pierre, son compétiteur, qui lui fit trancher la tête. Quelques historiens prétendent néanmoins qu’Aba fut tué dans la mêlée par ses propres soldats. Pierre, dit l’allemand, fut rétabli sur le trône. B-p.


ABACA-KAN, 8e empereur mogol, de la race de Djenguyz-Kan, était fils de Holakou-Kan, à qui il succéda en 663 de l’hégire (1265 de J.-C.). Au commencement de son règne, Barkah-Kan, roi de Bokhara, tenta de faire une invasion en Perse par les défilés du Caucase ; mais il fut défait par Techmout, frère d’Abaca-Kan. Cette victoire, loin d’effrayer Barkah, lui fit mettre un plus grand nombre de troupes sur pied. Il se dirigea de nouveau vers l’Adzerbaîdjan. Abaca-Kan, de son côté, s’était mis en défense ; mais au moment où les deux partis allaient en venir aux mains, Barkah mourut, et ses troupes s’en retournèrent à la hâte. En 1269, Borac-Oghlan envahit le Khoraçan ; Abaca-Kan, prince aussi actif que bon guerrier, marcha contre lui, le rencontra près d’Hérat, le mit en fuite, et reprit le Khoraçan, dont il donna le gouvernement a l’un de ses frères. Lorsque Abaca-Kan eut repoussé ses ennemis, et qu’il eut, par son bon gouvernement, donné le repos à son empire, il conçut le projet de réduire la Syrie et