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ADO

Il se flatta que le nom seul du roi mettrait Gènes à couvert des entreprises du duc de Milan, tandis que la faiblesse du caractère de Charles VI l’empêcherait d’attenter a la liberté génoise. Adorno mourut de la peste l’année suivante, avant d’avoir pu reconnaître combien il s’était trompé. — George Adorno, fils du précèdent, fut crée doge, en 1413, par le peuple génois, au moment où il parvint a secouer le joug des Français qu’Antoniotto lui avait imposé. George était recommandable par la douceur et la pureté de ses mœurs ; mais ses talents ou son caractère ne suffisaient point pour dompter la violence, des factions, qui s’était encore augmentée pendant que Gènes était privée de sa liberté. Il renonça volontairement a sa dignité, un 1415, pour faire place à Barnabas Goano. S. S-i.


ADORNO (Raphaêl), fils de George et petit-fils d’Antoniotto, fut élu doge en 1443. Philippe Marie, duc de Milan, et Alphonse, roi d’Aragon et de Naples, faisaient à la république une guerre acharnée, et donnaient des secours aux rebelles ; Raphaël réussit a obtenir la paix du roi d’Aragon, et a réprimer Pierre Frégoso, son ennemi personnel ; mais ses partisans se plaignirent de sa modération et de son impartialité, qui ne leur laissaient recueillir aucun fruit de leurs victoires. Ils lui demandèrent, comme une marque de dévouement à sa patrie, de renoncer de lui-même a la magistrature suprême, l’assurant qu’il apaiserait ainsi toutes les factions. Raphaël suivit leurs conseils ; il donna son abdication en 1447 ; et quoique son désintéressement demeurait sans avantage pour la république, il fut applaudi par tous les citoyens vertueux. ─ Barnabas Adorno s’empara, en 1447, à force armée, de la dignité que Raphaël venait d’abdiquer. C’était lui que les partisans de la famille Adorni avaient voulu élever au trône ducal, préférant les qualités d’un chef de parti à celles d’un magistrat ; mais Barnabas ne conserva pas plus d’un mois cette dignité suprême. Il fut chassé de son palais par la faction ennemie, et Pierre Frégoso lui fut donné pour successeur. S. S-i.


ADORNO (Prosper), 6e doge de la même famille, chassa, en 1461, les Français de Gènes, avec l’assistance de François Sforza, duc de Milan, et se réconcilia aux Frégosi, en élevant l’un d’eux a la dignité d’archevêque de Gènes ; mais il ne put voir sans jalousie la gloire dont Paul Frégoso se couvrait dans la guerre contre les Français ; il lui défendit de rentrer dans la ville, après une victoire sur René d’Anjou. Frégoso y rentra de force, et en chassa Prosper avec ses partisans. Ce même homme fut mis en prison par les ducs de Milan, lorsque Gènes se fut soumise à eux : Jean Galéas Sforza crut ensuite pouvoir le tirer de la forteresse de Crémone ou il était arrêté, pour le faire ; en 1477, gouverneur de Gènes. Prosper employa l’aide des Milanais à réduire les factions ; et, dès qu’il eut rétabli l’ordre dans la ville, il en chassa ces auxiliaires dangereux. Il battit les troupes de Jean Galeas, le 7 août 1478 ; et a peine avait-il assuré par cette victoire la liberté de sa patrie, qu’une sédition des Frégosi le contraignît à s’enfuir. Il se rendit à la nage sur un vaisseau de Naples, qui le conduisit dans cette ville, ou il mourut en 1486. S. S-i.


ADORNO (Antoniotto II) fut créé doge de Génes en 1513 et en 1522, par le crédit de son frère Jérôme, l’un des hommes d’Italie en qui les talents de guerrier et de négociateur étaient le mieux réunis. Il avait recherché pour sa famille et pour celle des Fieschi la protection de la France. Ce fut par elle qu’Antoniotto fut élu doge la première fois. La perte de la bataille de Novare, et les revers des Français en Italie forcèrent Jérôme à se retirer, et son frère, à céder la place de doge à Octavien Frégoso, son adversaire. Les Adorni embrassèrent ensuite le parti de l’empereur, et c’est avec l’appui d’une armée de Charles-Quint qu’Antoniotto fut élu doge la seconde fois ; mais son installation fut souillée par le pillage de Gènes, que le marquis de Pescaire permit a ses soldats. Jérôme, cependant, conseiller intime de Charles-Quint, entreprit de réunir par une ligue toutes les puissances de l’Italie contre les Français ; il détermina le duc de Ferrare a entrer dans cette alliance ; et il y avait presque décide les Vénitiens, lorsqu’il fut surpris par la mort, en 1523, au milieu de ses négociations. La ligue qu’il avait projetée fut conclue au mois de juillet de la même année. Antoniotto Adorno conserva son pouvoir sur Gênes, jusqu’à l’année 1527, époque où cette ville fut prise par André Doria, alors amiral des Français. Le doge se retira dans la forteresse nommée Castelletto ; et il y avait peu de temps qu’il avait été oblige de la rendre, lorsque André Doria, passé au service de l’empereur, remit Gènes en liberté, le 12 septembre 1528, et anéantit les factions qui avaient coûte tant de sang à sa patrie. Alors, fut abolie la loi qui excluait les nobles du gouvernement ; le nom des Adorni et des Frégosi, qui avait fait verser tant de sang, et qui avait précipité si souvent la république sous le joug du duc de Milan, des Français et de l’empereur, ce nom fut aboli pour jamais ; les individus de ces deux familles furent obligés de le quitter, pour prendre, à leur choix, celui d’un des vingt-huit Alberghi, entre lesquels on partagea la noblesse, et cette adoption forcée, dans une famille étrangère, mit fin à une rivalité et à des haines qui avaient duré 165 ans. S. S-i.


ADORNO (le P. François), jésuite, né en 1531, a Gènes, de la même famille que le précédent, fut envoyé dans sa jeunesse en Portugal, pour y perfectionner ses études. Il embrassa la règle de St-Ignace, et peu de temps après, ses supérieurs l’appelèrent a Rome, ou il professa la théologie, et se plaça, par ses prédications, au rang des plus célèbres orateurs. Nommé recteur du collège de Milan, il fut ensuite chargé de l’administration de différentes maisons de son ordre. Ch. Borromée, archevêque de Milan, le choisit pour son confesseur et l’honora de toute sa confiance. Il accompagna ce prélat dans le pèlerinage qu’il fit a Turin pour visiter le saint suaire. Cet acte de dévotion ayant été désapprouvé par le pape Grégoire XIII, Adorno écrivit a ce sujet une lettre qui fut traduite en latin et imprimée à Turin en 1581,