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de soixante-dix ans, on le précipita du toit de si propre maison dans la rue, pour avoir donné asile aux hérétiques. Adamson avait composé pendant sa détention une traduction en vers du Livre de Job, et une tragédie latine sur la mort d’Hérode ; ces deux ouvrages furent imprimés en 1572. La vie de ce théologien était destinée aux agitations et aux dangers. De retour dans sa patrie, il y prit les ordres, et fut nommé ministre de Paisley. Le comte de Morton, régent d’Écosse, l’ayant choisi pour être membre d’une commission chargée de régler la juridiction et la police de l’Église nationale, Adamson y montra un zèle en faveur de l’épiscopat, qui engagea le régent à le proposer pour l’archevêché de St-André. Ce choix éprouva une vive opposition de la part des presbytériens, qui, dans une assemblée générale, voulurent le soumettre à un examen sévère, et ne lui conférer l’épiscopat qu’avec des limitations très-rigoureuses. Cette opposition n’empêcha pas le chapitre de St-André d’élire Adamson ; mais l’assemblée presbytérienne attaqua la validité de l’élection, qui ne fut confirmée qu’aux conditions qu’il lui plut de prescrire, et auxquelles le nouvel archevêque fut obligé de souscrire. On lui a reproché d’avoir montré dans toute cette affaire une grande pusillanimité, qui ne fit qu’encourager la violence de ses ennemis, et qui le rendit la victime d’une éternelle persécution. Des accusations sans cesse renaissantes le tenaient dans un état de défensive humiliant et pénible. Une aventure extraordinaire vint aggraver sa situation : il fut attaqué d’une maladie dangereuse qui résistait à tous les moyens que les médecins purent employer. N’attendant plus rien des secours de l’art, il consentit a faire un remède qui lui fut proposé par une vieille femme inconnue, et ce remède eut un effet aussi heureux que prompt. L’archevêque fut accusé d’avoir eu recours au diable pour se guérir d’une maladie regardée comme incurable ; la vieille femme fut dénoncée comme sorcière, emprisonnée et soumise à un jugement. L’ignorance et la crédulité publiques étaient égales à la fureur de l’esprit de parti ; et les juges, entrainés par l’effervescence populaire, condamnèrent la malheureuse femme à être brûlée. Le roi Jacques étant venu, en 1583 visiter la ville de St-André, Adamson prononça devant lui un sermon et soutint une espèce de thèse de controverse, dans laquelle il défendit avec autant de zèle que de talent les droits de l’Église épiscopale ; le roi fut si satisfait de lui dans cette occasion, qu’il le nomma son ambassadeur auprès de la reine Élisabeth. Adamson prêcha devant cette princesse d’après les mêmes principes, avec tant d’éloquence et de succès, que la reine, jalouse de la popularité naissante de Jacques, défendit au prédicateur de remonter en chaire. De retour en Écosse, Adamson continua de servir les desseins du roi pour l’établissement de l’épiscopat dans ce royaume, et il fit passer au parlement plusieurs actes favorables à ce plan. Sa conduite ne fit qu’exaspérer de plus en plus la rage des presbytériens ; et comme ce parti était celui de la majorité de la nation, il parvint aisément à rompre toutes les mesures du roi, et à se venger sur le prélat qui en était le principal instrument, Un synode tenu à St-André, en 1586, excommunia formellement l’archevêque, qui, de son côté, excommunia le modérateur du synode. Ou intenta contre lui diverses accusations, et l’on nomma une commission pour en faire un rapport. Une des accusations était d’avoir violé une loi existante dans l’Église d’Écosse, en mariant le comte de Huntley sans lui avoir fait souscrire une profession de foi ; l’archevêque fut condamné. Pour mettre le comble aux disgrâces d’Adamson, il ne lui manquait plus que d’être abandonné par le prince au service duquel il s’était sacrifié, mais à qui il ne pouvait plus être utile. Jacques accorda le revenu de l’archevêché de St-André au duc de Lenox, et laissa le malheureux Adamson dans une telle détresse, qu’il ne pouvait, à la lettre, donner du pain à sa famille. Abattu par la misère, il prit le parti d’adresser à l’assemblée presbytérienne un désaveu formel de toutes les opinions qu’il avait soutenues sur la discipline ecclésiastique, et qui avaient donné de l’ombrage aux presbytériens. Cette démarche ne fut pas suffisante pour désarmer la haine de ses ennemis, qui la regardèrent comme dictée par la nécessité, et il ne parait pas qu’elle ait contribué à améliorer sa situation. Adamson ne trouva de moyens de subsister que dans des contributions charitables, et il termina sa malheureuse vie à la fin de 1591. Une teinte de fanatisme, jointe à une extrême faiblesse de caractère, a été la source de ses malheurs. Il ne sut ni modérer ses opinions, ni les soutenir avec la fermeté et l’adresse que les circonstances exigeaient. Quant à ses talents, ils se réduisaient à faire d’assez bons vers latins et à prêcher avec une éloquence populaire. Thomas Wilson, son gendre, à la tête de l’édition in-4o qu’il a donnée, en 1619, des ouvrages de son beau-père, n’a pas craint de le présenter comme un miracle de la nature, qui paraissait plutôt une production immédiate du Dieu tout-puissant, qu’un être sorti du sein d’une femme. S-d.


ADANSON (Michel), botaniste, naquit à Aix en Provence, le 7 avril 1727. Son père, Écossais d’origine, s’était attache à M. de Vintimille, alors archevêque de cette ville. Ce prélat ayant quitté ce siége pour celui de Paris, Adanson fut amené dans cette capitale à l’âge de trois ans. Son éducation fut très-soignée, et il y répondit par des succès prématurés. Comme il était d’une petite stature, il paraissait plus jeune encore qu’il ne l’était ; et il excita une admiration générale, lorsqu’on le vit remporter les premiers prix de l’université, et qu’il se trouva, pour ainsi dire, caché sous un Pline et un Aristote. Needham, naturaliste célèbre par ses découvertes microscopiques, témoin du triomphe de cet enfant, lui fit présent d’un microscope, et lui dit : « Puisque, jusqu’à présent, vous avez si bien appris à connaître les ouvrages des hommes, vous devez, étudier ceux de la nature. » Ces circonstances entraînèrent Adanson vers l’histoire naturelle. Bientôt il voulut, comme Pline, l’embrasser tout entière, et, comme Aristote, en lier toutes les parties. Il ne négligea cependant aucun genre de connaissances,