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girart de roussillon

avec elle au gain. Je vous donnerai tout ce qui vous sera nécessaire, vivres en abondance, deniers, vêtements, bain. — Oui, sire, » dit-il, « si je reste avec vous ; mais je préfère servir celui[1] de qui nul n’a lieu de se plaindre. » Le comte prit la perche, qui était neuve et de chêne[2], et la comtesse, marchant la première, ne lâche pas son bout et se montre vaillante[3] jusqu’à ce qu’ils soient arrivés au moutier où les cloches sonnent.

661. Girart vit cette lumière resplendissante, il vit que la perche se tenait toute droite, sans incliner ni peu ni prou. Il se sentit alors le cœur rempli de piété et d’humilité. Il soutenait la perche par derrière, elle par devant, jusqu’à ce qu’ils furent entrés au moutier. Les clercs chantèrent entre eux[4] un chant d’actions de grâces pour ce grand miracle. Le comte ouït le service au point du jour.

662. Le comte ouït un court service le matin. Il entra, avec ses privés, en une chambre voûtée, blanche comme neige : « Comtesse, » dit le comte, « tu appartiens véritablement à Dieu : il fait pour toi de grands miracles, à ce que je vois. — Sire, non pas pour moi, mais pour le pèlerin et pour la Madeleine.....[5] pour qui Dieu ressuscita le juif[6]. — Je manderai, » dit-il, « Barthélemi, l’évêque d’Autun, et André, pour mettre par écrit les miracles [qui viennent d’a-

  1. Dieu.
  2. Lo tinal nou de casaing, Oxf., traduction douteuse : la leçon de P. (v. 8734) non ac desdenh, est claire, mais visiblement due à la correction d’un copiste.
  3. Ici encore la leçon de P. (v. 8735, E la comtessa es vana e sos cap fenh, est refaite, et celle d’Oxf., E la contesse enant non giquis faing semble corrompue. Je traduis comme s’il y avait non gic nis faing.
  4. D’après P. (v. 8743) ; « tous trois » Oxf., peut-être le prêtre, le diacre et le sous-diacre.
  5. Oxf. ufazanz preu, P. (v. 8752) on fa son priu.
  6. Il est bien question, dans la légende de Marie Madeleine, d’un mort ressuscité, mais ce mort était chrétien.