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girart de roussillon

rart, « moi je suis content, car je vois actuellement mes ennemis abaissés. La valeur abat l’orgueil, comme la pluie fait tomber le vent. Maintenant que nous les tenons enfermés comme des bêtes de somme, je me tiendrai pour satisfait de tout arrangement que nous ferons avec eux. »

629. Le comte voit ses troupes, dont le nombre va croissant, entrer[1] de façon à se dissimuler. « Je me tiendrai, » dit-il, « en cette plaine ; Bertelais sera, avec les gens de pied, par ce marécage, et par ici, sur la droite, seront nos Tiois. » Sur ces entrefaites, Fouque arrive par les champs couvert de chaume et descend à pied du brun cheval maure. Il prit Girart à part, craignant qu’il fit quelque folie.

630. Fouque appela Bertran, qui est bon, et, s’adressant à Girart : « Sire, » lui dit-il, « que veux-tu faire ? — Tirer de là dedans mes félons ennemis. Ils ne cessaient de faire bruit de leur guerre, aujourd’hui les remparts de leur orgueil sont à bas. Garde-toi d’être leur refuge, car Dieu est équitable et ses jugements sont droits. » Et Fouque lui dit : « N’en faites rien, frère. Le roi est notre seigneur et mon compère[2], et la reine est pour nous une mère. Si vous avez pour elle de la reconnaissance, il est droit que vous le fassiez voir. » Girart se prit à lui rappeler Boson, guerrier comme il n’en sera jamais[3]. « Et vous aussi, vous êtes vaillant, mais vous êtes trop sermonneur. De cette nuit je ne bougerai pas, dût-on m’arracher une dent, et, demain matin, je ferai à votre gré et me soumettrai à toutes les volontés de notre empereur. — Laisse le, » dit Bertran[4], « faire comme il l’entend. » Ce lui fut un grand soulagement de voir Girart se calmer.

  1. On ne dit pas où. Le texte est incertain. Girart se dispose à occuper Troyes.
  2. On a vu, au § 608, que le roi était le parrain du fils de Fouque,
  3. C’était une façon de reprocher à Fouque ses sentiments pacifiques.
  4. S’adressant à Fouque.