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girart de roussillon

Fouchier et Agenois vont les férir. Ils n’étaient pas plus de trois cent trente-trois, mais jamais pareil nombre ne fit si bien, car ils passèrent à travers dix-sept cents hommes, et à la charge en retour l’ennemi avait disparu. Girart eut toujours à se louer de cette affaire.

393. Agenois vient chevauchant sur Anderoc[1], un cheval de prix originaire du Maroc. On ne vit jamais chevalier qui sache aussi bien se battre. Il ne touche personne qu’il ne l’abatte mort ; son gonfanon jaune en était devenu rouge. Lorsqu’il tomba, ce fut pour ses péchés[2]. Il n’y eut, parmi ceux de Charles, homme qui, l’ayant vu, ne courût sur lui. Son haubert ne lui valut un morceau de drap. Il reçut tant de coups qu’il tomba pour ne plus se relever.

394. Fouchier voit les siens rompus, Agenois mourir des coups qu’il avait reçus, et venir Andefroi qui lui adresse des injures : « Par Dieu, Fouchier, je ne vous estime ni ne vous redoute, et je convaincrai Girart de trahison ! » Et il lui répond : « Vous en avez menti, gredin ! Je suis homme de Girart, le preux comte, et je me tiens pour lâche de te laisser tant parler. »

395. Fouchier frappe Andefroi sur le blanc haubert, et le lui rendit rouge de sang ; il lui perça le cœur, le foie, le flanc, il l’abattit la face contre terre, et lui dit : « Cherchez un prêtre pour vous panser. Vous ne l’avez pas vu comploter la trahison dont vous parlez. J’en défends le franc comte Girart. »

396. Aimon et Aimeri vinrent au galop, et ils virent comment Fouchier avait tué leur frère. Ils se désolent, chacun disant : « Malheureux que je suis ! Ha ! frère Andefroi, ami

    l’usage de chanter le Κύριε ἐλέησον au commencement du combat. La plupart de ces textes se rapportent à l’ancienne histoire d’Allemagne.

  1. Branderoc P. (v. 5199).
  2. Il tomba, non qu’il fut mauvais chevalier, mais en punition de ses péchés.