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introduction

du nom de Charles Martel, ne sont pas mieux respectées. Il est visible que l’auteur de Rolant a pris au hasard ce nom de Girart de Roussillon dans la poésie de son temps, sans se soucier le moins du monde de lui prêter un rôle qui pût s’accorder avec les récits courants.

Nous trouvons des allusions plus précises à l’histoire fabuleuse de Girart de Roussillon dans des chansons de geste moins anciennes, à la vérité, que Rolant, mais dont les témoignages n’en ont pas moins une très grande valeur, parce qu’on peut prouver qu’ils se rapportent à une chanson de Girart de Roussillon différente de celle qui nous est parvenue, et sans aucun doute plus ancienne. Dans l’ordre chronologique, nous rencontrons d’abord le témoignage de la vieille chanson de Garin le Lorrain. Ce qui résulte de ce témoignage, c’est que des guerres interminables avaient eu lieu entre Charles Martel et Girart et que le pays en était resté appauvri jusqu’au temps du roi Pépin, le successeur de Charles Martel. Citons les textes. Nous voyons d’abord le traître Hardré dire à Pépin, pour le détourner de secourir Hervis attaqué par les Hongres :

« Hervis est riches et enforciés d’amis,
« Trés bien se puet salver et garantir.
« Tes regnes est soufreteus et chetis,
« Il n’i a homme qui s’i puisse esbaudir,
« Tant a Gerars. qui le Rossillon tint,
« Gasté la terre et trestout le païs.

(Garin le Loherain. éd. P. Paris. I. 53.)