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203 MERCVRE DE FRANCE— 16-XI-1908 impression, quelques démarches qu’ait faites Lamartine dans la suite, singulièrement auprès de Mademoiselle, depuis Mme Adélaïde. A la fête donnée dans le Palais-Royal au roi et à la reine de Naples, en juin i 83o, le prince, qui se confondait en politesses avec bonapartistes et libéraux, détourna les yeux quand le poète entra, boutonné dans son grand uniforme, avec Mme de Lamartine au bras. Vainement, l ’invité affectait de rester sur le seuil, s ’inclinant à plusieurs reprises : Mon­ seigneur continua de ne le pas voir. Cet affront, ressenti par Lamartine avec fureur, décida de sa carrière. De là, sa démis­ sion de diplomate en septembre i 83o ; de là son adhésion à la politique des ministres, à la fois que son opposition au monarque ; de là cette « indépendance énigmatique », et pour parler net, cette équivoque à laquelle il dut sa fortune au 24 février. Un salut, un sourire, et M. de Lamartine, au lieu de renvoyer le vieux roi dans un fiaere, aurait appuyé peut-être les avis de Bugeaud, qui étaient de sabrer la canaille. Le début de Lamartine dans la politique fut, comme il sied, une Ode au peuple du vingt-neufju ille t , où il adjurait ce vainqueur à la magnanimité envers les ministres de CharlesX: et ceux-ci ayant eu la vie sauve, le poète estima que « l’ his­ toire ne devait pas oublier ce dévouement ». Elle n’ aura garde, en effet, de laisser périr une strophe comme celle-ci : Peuple, dirai-je, écoute, et juge ! Oui, tu fus grand, le jour où du bronze affronté Tu le couvris, comme un déluge, Du reflux de la liberté ! Tu fus fort, quand, pareil à la mer écumante, Au nuage qui gronde, au volcan qui fermente, Noyant les gueules du canon, Tu bouillonnais, semblable au plomb dans la fournaise, Et roulais, furieux, sur une plaçe anglaise, Trois couronnes dans ton limon ! Puis, comme des élections était fixées au mois de juillet 1841> et qu’on le savait ambitieux d’ un mandat, deux candi­ datures lui furent offertes : l’ une à Dunkerque, où l’ une de ses sœurs avait épousé M. de Coppens, grand propriétaire, non sans influence sur les riches libéraux de la contrée ; l’ au­ tre dans la circonscription rurale de Toulon, où l’appelait un Hyérois lettré, son contemporain, M. Meissonnier de Val- croissant. Ce Meissonnier avait débuté delà façon la plus mo­