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avec de l’esprit. On ne peut lui refuser la premiere, la plus noble, la plus grande des vertus, l’amour de l’humanité. Il a coombattu avec chaleur pour les intérêts de l’homme. Il a détesté, il a flétri la persécution, les tyrans de toute espece. Il a mis sur la scene la morale raisonnée & touchante. Il a peint l’héroïsme sous ses véritables traits. Il a été enfin le plus grand poëte des François. Nous avons conservé son poëme, quoique le plan en soit mesquin ; mais le nom de Henri IV le rendra immortel. Nous sommes surtout idolâtres de ses belles tragédies, où règne un pinceau si facile, si varié, si vrai. Nous avons conservé tous les morceaux de prose où il n’est pas bouffon, dur ou mauvais plaisant[1]. Mais vous savez que vers

  1. Je chéris le peintre de la nature, qui laisse jouer son pinceau sur la toile, qui préfère une certaine liberté franche & hardie, à cette régularité qui me rappelle sans cesse l’art & son mensonge. Oh ! qu’il sera brillant l’écrivain livré tout entier à son génie, qui s’abandonne à des négligences volontaires, séme d’une main légére des traits heureux et mêlangés, daigne avoir des défauts, se plaît dans un certain désordre, & n’est jamais si intéressant que lorsqu’il se montre irrégulier. Voilà l’homme de goût par excellence ; il sait que l’ennuyeuse symétrie n’enchante que les sots, que toutes les imaginations vives aiment qu’on leur