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de la grandeur de celui qui l’a bâti[1]. Les rois, ses successeurs, ont été obligés de fuir, de peur d’être écrasés. Puissent ces ruines crier à tous les souverains, que ceux qui abusent d’une puissance momentanée ne font que dévoiler leur foiblesse à la génération suivante… À ces mots il versoit un torrent de larmes, & regardoit le ciel d’un air contrit. — Pourquoi pleurez-vous, lui dis-je ? Tout le monde est heureux, & ces débris n’annoncent rien moins que la misère publique ? … Il éleva sa voix & dit : « Ah ! Malheureux ! Sachez que je suis ce Louis XIV, qui a bâti ce triste palais. La justice divine a rallumé le flambeau de mes jours pour me

  1. On loue ces magnifiques spectacles donnés au peuple Romain. On veut inférer de-là la grandeur de ce peuple. Il fut malheureux dès qu’il commença à voir ces fêtes fastueuses où étoit prodigué le fruit de ses victoires. Qui bâtit les cirques, les théâtres, les thermes ? qui creusa ces lacs artificiels où toute une flotte manœuvroit comme en pleine mer ? Ce furent ces monstres couronnés, dont le tyrannique orgueil écrasoit la moitié du peuple pour réjouir les yeux de l’autre. Ces énormes pyramides dont se vante l’Égypte, sont les monumens du despotisme. Les républicains construisent des aqueducs, des canaux, des chemins, des places publiques, des marchés ; mais chaque palais qu’élève un monarque, est le germe d’une prochaine calamité.