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CHAPITRE XXXVII.

De l’héritier du Trône.


Plus interrogeant que ne le fut jamais le bailli du huron[1], je continuai à exercer la patience de mes voisins. — J’ai bien vu le monarque assis sur son trône ; mais j’ai oublié, messieurs, de vous demander où étoit le fils du roi, de mon tems appellé dauphin ? — Le plus poli prit la parole et me dit :

Convaincus que nous sommes que c’est de l’éducation des grands que dépend le bonheur des peuples, & que la vertu s’apprend comme le vice se communique, nous veillons avec le plus grand soin sur les jeunes années des princes. L’héritier du trône n’est point à la cour, où quelques flatteurs oseroient peut-être lui persuader qu’il est plus que les autres hommes, & que ceux-ci sont moins que des insectes ; on lui cache soigneu-

  1. Le Huron ou l’Ingénu, Roman de Voltaire, un des mieux faits qui soit sorti de sa plume.

    Le Huron enfermé à la Bastille avec un Janséniste est la chose du monde la plus ingénieusement imaginée.