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avez à faire : vous lui demanderez une autre lecture devant un comité de sept membres ; s’il vous la refuse, menacez-le d’en appeler à l’autorité supérieure, pour faire casser tout ce qu’il a fait, comme étant illégal. Je puis vous assurer qu’il ne résisterait pas à un ordre d’en haut. En vous donnant ce conseil, mademoiselle, je crois servir les intérêts de mes confrères, tout comme les vôtres. »

Nous quittâmes M. Joanny et nous nous rendîmes chez M. Monrose, qui parut fort surpris de ce que M. Taylor ne m’avait pas fait de réponse. Il me dit aussi qu’il fallait que j’eusse une autre lecture, mais qu’il me conseillait d’attendre que Camille Desmoulins fût joué, pour qu’aucun des membres du comité ne manquât ; que ma pièce était trop importante pour être lue devant un comité illégal…

« Mais qu’avez-vous donc fait à M. Taylor, mademoiselle, pour qu’il vous soit si défavorable ?

— Rien, que je sache, monsieur ; je ne l’avais jamais vu, et, par conséquent, je ne pouvais l’avoir offensé. »

M. Monrose me dit qu’il allait voir M. Taylor, et qu’il allait le faire m’écrire. Effectivement, je reçus dans la journée une lettre du secrétaire de la Comédie Française. Il me priait de passer au théâtre le dimanche suivant, M. Taylor désirant m’entretenir. Deux messieurs, qui étaient venus avec nous à ma lecture, eurent la complaisance de nous accompagner le dimanche au rendez-vous que venait de nous faire donner M. Taylor. Nous le trouvâmes ; je lui demandai des nouvelles de ma tragédie : il me dit que c’était pour m’en parler qu’il m’avait fait prier de passer.

« Eh bien ! monsieur, saurai-je enfin ce que ces messieurs pensent de ma pièce ?

— Ces messieurs, mademoiselle, en trouvent le plan parfait ; ils admirent la beauté des vers, la rapidité du dialogue, ainsi que la vérité des passions que vous y avez traitées. Ils trouvent la mise en scène magnifique, et votre cinquième acte du plus grand effet.