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Viens ; dans tous les climats le bonheur s’habitue.
Choisissons dans l’Afrique une rive inconnue :
Là, séjour enchanté de l’amour, de la paix,
Ma cabane au désert deviendra mon palais.
Zoraïde, pour nous quel avenir s’apprête !
Sous mon toit de palmier viens reposer ta tête.
Quels jours s’écouleront plus heureux que les tiens !
Je les entourerai de tant d’amour !… Oh ! viens !

ZORAÏDE.

Qui, moi ? moi, mériter le malheur par le crime !
De quel égarement êtes-vous la victime ?
Avez-vous pu penser qu’à ce cœur abattu
L’infortune ferait oublier la vertu ?
Non, ne l’espérez pas ; à mes sermens fidèle,
Je serai malheureuse, et non pas criminelle.

ABENHAMET.

J’ai pu te proposer de trahir ton devoir ?
De me suivre ? Ah ! mon cœur, s’il l’a pu concevoir,
Désavoue à jamais ce projet condamnable.
Je sais trop bien t’aimer, pour te rendre coupable.
Mais, avant de partir, que du moins, pour adieu,
J’entende un mot d’amour, un mot… bientôt, grand Dieu !
L’Africain doit me voir sur son brûlant rivage.
J’y veux pour mes tourmens emporter du courage ;
Oh ! donne-m’en ! sans toi, sous le ciel du désert,
Je vais souffrir encor plus que je n’ai souffert.
Quand l’honneur m’y défend jusques à l’espoir même,
Zoraïde, qu’au moins je me dise : elle m’aime !
Oh ! dis-moi qu’il n’est pas d’absence pour le cœur ;
Dis-le-moi, j’ai besoin de ce dernier bonheur.

ZORAÏDE.

Oui ! ma douleur m’arrache à ma contrainte extrême.
Pars, ne crains rien du temps, de l’espace, je t’aime !