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INÈS.

Oui, je sais vous comprendre, ô ma noble maîtresse !

ZORAÏDE.

Et pourquoi voudrais-tu me priver aujourd’hui
Du douloureux plaisir de te parler de lui ?
Tu crains pour moi ces lieux tout pleins de sa présence,
Ah ! connais donc enfin leur charme, leur puissance !
Sais-tu bien, chère Inès, qu’il me semble, en ces lieux,
S’échapper de mon cœur pour paraître à mes yeux ?
Ce prestige enivrant d’un souvenir de flamme
Me le rend tel qu’il est aux regards de mon âme.
Oui, souvent, douce erreur ! je l’entends, je le vois.
Il me semble que l’air a retenu sa voix ;
Qu’il vient, que de ses pas le bruit me frappe encore,
Qu’il est là, qu’il me parle, et me dit qu’il m’adore.
Oui !


Scène III.

ZORAÏDE, INÈS, ABENHAMET.
ABENHAMET, qui a entendu Les derniers mots de Zoraïde, s’approche doucement et lui prend la main.

          Zoraïde !

ZORAÏDE, se levant et jetant un cri.

                            Oh ! ciel ! vous ici ! fuyez-moi !
Fuyez ! l’honneur le veut !

ABENHAMET.

                                                D’où le vient cet effroi ?
Je ne m’applique pas le trouble qui t’agite.
Quand tu m’as appelé, tu veux presser ma fuite ?
Près de moi, Zoraide, ah ! bannis ta frayeur ;
Elle empoisonnerait ce moment de bonheur.