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Rends au luth détendu sa musique céleste :
De ta courte journée une heure au moins te reste ;
Une heure ! c’est assez pour vaincre l’avenir :
C’est au brillant séjour que ton hymne s’élance :
Le poète au tombeau retrouve l’existence ;
        Qui laisse un nom peut-il mourir ?

Vous qui deviez parer le chantre de Clorinde,
Lauriers aoniens, douces palmes du Pinde,
L’amant de Léonor n’a donc pu vous cueillir !
Le Tasse à ses destins un jour trop tôt succombe ;
Mais vos nobles rameaux, déposés sur sa tombe,
        Fleurissent pour son souvenir.

L’oubli, c’est le néant ; la gloire est l’autre vie ;
L’éternité sans borne appartient au génie :
Le monde est un écho des purs accens des cieux.
Sur la mer du passé le poète surnage ;
Chaque flot qui se brise et le pousse au rivage
        Exhale un son mélodieux.

Ennemi des tyrans, du crime qui s’élève,
Il combat, il triomphe, et sa lyre est son glaive.
Libre comme la voix qu’empruntent les remords,
Cette lyre sans cesse auprès du cœur résonne,
Et l’homme, sous le chaume, ou sous le dais du trône,
        Entend ses suprêmes accords.