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A travers les cheveux effrayants de Çiva.

Kriçhna, l’enfant divin, le long des berges, va,
Plein d’aise. La liane et la brise au passage
Caressent le lotus sombre de son visage
Épanoui. Pieds nus sur les cailloux luisants,
II court avec le souffle et l’onde. II a six ans.
Il court. Pleines de fleurs, ses mains sont des corbeilles.
Il jase avec le flot qui chante et les abeilles.
Sa nourrice le suit et dit souvent : « Kriçhna,
Prends garde ! » Mais l’enfant rase le bord et n’a
Point souci de la voix grondeuse qui s’effraie.

Or, près de l’eau, teignant de sang la verte haie,
Les fruits ronds du vimba rougissent par milliers.
On pourrait, d’un peu loin, croire que des colliers
De corail au milieu des fleurs d’épine écloses
Ont dénoué leurs fils et semé leurs grains roses.
Sous les feuilles du blanc jasmin qui la voila
Kriçhna ne cherche plus l’abeille. Le voilà
Mordant la chair, buvant le sang des graines mûres,
Et les roux écureuils enfuis sous les ramures,