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Et que tous les amours ne sont que sa lignée.
Pur, même dans la chair, suprême et radical,
Intime, il est celui qu’on nomme conjugal ;
Il veut l’hymen ; il prend deux Esprits et les mêle
Au point qu’ils seront un quoique mâle et femelle,
Ainsi que les deux yeux ne sont qu’un seul regard.
Aucun ange n’est seul. Satan vit à l’écart.
Humains, soyez époux 1 Des froideurs et des haines,
Comme un captif se fait un bon engin des chaînes
Et de l’anneau de fer à sa jambe rivés,
Faites-vous de l’Amour afin d’être sauvés !
Foyer dévorateur du mal, pas d’immondice
Dont il ne se renforce et ne se ragrandisse !
Sur les monts, dans le lit desséché d’un torrent,
Quand un pâtre, au milieu de son bétail errant,
Active un large feu dont la nuit s’épouvante,
Il lance à pleines mains dans la splendeur vivante
Des, racines, de noirs lichens, des troncs pourris,
Et pourtant, de ce tas immonde de débris,
Tant de jour envahit le vieux mont taciturne
Qu’au loin, dans les vallons, le voyageur nocturne
Croit rêver, et, criant : Quelle est cette aube, ô Cieux !
De peur d’être aveuglé met la main sur ses yeux.