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de poète, le digne homme qui vient d’accompagner au cimetière une jeune et adorée fille unique, n’a plus, pour dépasser les artistes célibataires qu’à faire mention, sur une feuille de papier trempée de ses larmes, de la douleur qu’il éprouve ! Misérable confusion entre les choses du cœur qui appartiennent à tous, et la rare faculté de les exprimer idéalisées par l’imagination ! Être capable de ressentir et plus pronfondément que quiconque, mais avoir en surcroît le don inné, puis développé par le travail, de communiquer dans une forme parfaite ce qu’on a ressenti, voilà ce qui est indispensable pour être poète et voilà aussi pourquoi les vrais postes sont si rares ! En un mot, puisque vous êtes homme, aimez, espérez, souffrez (cela est fatal, d’ailleurs !) mais pensez et rêvez et sachez mettre en usage, du plus noble au plus humble, du rythme à la ponctuation, tous les moyens de votre art.

Ces dernières lignes contiennent en réalité toute la théorie parnassienne tant de fois moquée.

Mais pour la faire triompher il fallait vaincre tous les faux élégiaques, tous les faux humanitaires, tous les débraillés, tous les mauvais poètes.

C’est à cela que le groupe parnassien fut utile. Et voilà pourquoi il était grand temps que Glatigny, le premier des Parnassiens, vînt