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On me doit, au milieu des femmes indignées,
Sous les pavés tombant drus comme des grêlons,
Ta belle chair qui saigne et tes beaux cheveux longs,
Aux mains de tes bourreaux, dispersés par poignées !

Et ton nom exécrable au souvenir humain,
Et tes os sans sépulcre, aux chairs évanouies,
Écrasés par la roue et blanchis par les pluies,
Devenus des jouets aux enfants du chemin !

— Hélas ! pardonnez-la, comme il l’a pardonnée,
L’injure que j’ai faite à lui bien plus qu’à vous !
Puisqu’il vous a montré l’exemple d’être doux,
Laissez au repentir ma jeune destinée.

— Le péché qu’une femme a commis contre lui,
Il peut le pardonner, si telle est sa pensée.
Mais puisqu’enfin sa loi n’est pas seule offensée,
Qu’il laisse agir en paix la justice d’autrui ! »

À ces mots, assemblant sa force rajeunie,
Vers l’épouse qui fuit blême en ses voiles blancs
Il marche, et ses vieux bras qui ne sont pas tremblants
Emportent d’un effort l’adultère impunie.