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Rêvant d’amour tout bas sous les cieux étouffants !
— Âme de l’homme, écoute en frémissant comme elle
L’âme immense du monde autour de toi frémir !
Ensemble frémissez d’une douleur jumelle.
Vois les pâles reflets des bois qui vont jaunir ;
Savoure leur tristesse et leurs senteurs dernières,
Les dernières senteurs de l’été disparu ;
— Et le son de la cloche au milieu des chaumières ! —
L’été meurt ; son soupir glisse dans les lisières.
Sous le dôme éclairci des chênes a couru
Leur râle entrechoquant les ramures livides.
Elle est flétrie aussi ta riche floraison,
L’orgueil de ta jeunesse ! Et bien des nids sont vides,
Âme humaine, où chantaient dans ta jeune saison
Les désirs gazouillants de tes aurores brèves.
Ame crédule ! Écoute en toi frémir encor,
Avec ces tintements douloureux et sans trêves.
Frémir depuis longtemps l’automne dans tes rêves
Dans tes rêves tombés dès leur premier essor.
Tandis que l’homme va, le front bas, toi, son âme.
Écoute le passé qui gémit dans les bois.
Écoute, écoute en toi sous leur cendre et sans flamme
Tous tes chers souvenirs tressaillir à la fois,
Avec le glas mourant de la cloche lointaine !
Une autre maintenant lui répond à voix pleine.
Écoute à travers l’ombre, entends avec langueur
Ces clorhes tristement qui sonnent dans la plaine.
Qui vibrent tristement, longuement dans ton cœur !