Page:Meister - Betzi.djvu/320

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Depuis que je me vis comme déplacée dans l’ordre de la nature, au moins de celui de nos institutions sociales, mon imagination se couvrait souvent du voile le plus sombre ; j’avais des accès de caprice et de chagrin auxquels il m’était impossible de résister. On me crut malade, je le devins en effet ; mais je ne cessai pas d’être l’objet des attentions les plus assidues et les plus délicates. Attendrie par tant d’amour, par tant de constance et par tant de bonté, je m’écriai souvent : Ah ! pourquoi ne puis-je être deux, ou pourquoi le sont-ils ? Quelquefois je desirai de mourir. Quelquefois je formai le vœu cruel de me voir abandonnée de l’un d’eux : mais je sentais trop que c’était me séparer de moi-même, et l’idée de la mort me semblait alors la plus douce et la plus consolante.