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de nous en faire éprouver le plus vif besoin. Le véritable amant comme le vrai dévot ne vit et n’aspire qu’à vivre dans l’objet aimé.

Quelle existence, quel bonheur personnel ne sacrifie-t-il pas sans regret, sans effort, à la douce illusion, au desir ardent de cette vie hors de lui ? un instant, un éclair de cette inconcevable félicité ne lui paraît pas trop payé de plusieurs années, de plusieurs siècles écoulés dans l’indifférence et dans l’isolement. Les dons les plus précieux, les sacrifices les plus pénibles, l’entier renoncement à nous-mêmes, le dévouement le plus absolu ne nous coûtent plus rien dans cette délicieuse exaltation de notre âme ; que dis-je ? ce qui, dans un état ordinaire, semblerait un effort surnaturel, devient alors l’accomplissement du besoin le