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niǰik‘ ագանիջիք « μένετε (menete) » (Luc X, 7) de aganim ագանիմ « je reste, je passe la nuit » ; utiǰik ուտիջիք « mangez » (Luc X, 7) de utem ուտեմ « je mange ». Cette forme est importante, car la 2me personne du pluriel en -ǰik‘ –ջիք a été substituée à la forme correspondante du subjonctif aoriste : la 2me personne du pluriel de gorceçiç գործեցից est gorcesjik’ գործեսջիք. — Le -ǰ- ջ de ces formes repose probablement sur *-dhy-, et alors on pourrait songer à un rapprochement avec la finale de 2me personne du singulier d’impératif skr. -dhi (-hi), gr. θι (thi), si l’on admettait l’addition d’un élément vocalique provoquant changement de *-dhi en *-dhy-. Il est impossible de rien déterminer ici avec précision.

c) Subjonctif.

90. — Le subjonctif présent de em եմ est içem իցեմ « que je sois », qui se fléchit comme em եմ : 2me pers. içes իցես, etc. Ici encore, on retrouve le suffixe *-ske-, ce qui rappelle lat. escit « il sera » (dont il faut séparer pâli acchati, prâkrit acchaï « il reste », cf. Turner, Bull. of the School of Orient Stud. VIII, 1936, p. 795) ; la voyelle initiale i- ի– représente peut-être un ancien i, qui reparaît dans isk իսկ « en réalité » (de *is-two- ?), et qui serait alors à rapprocher de l’iota initial de gr. ἴ-σθι (isthi) « sois », tchèque jsem « je suis » : ce i- initial devant s-, en alternance avec e, pourrait être une voyelle prothétique développée devant la forme sans e, s- de la racine *es- ; cf. peut-être v. sl. jis, jiz, lit. , arm. i « de » en regard de gr. ἐξ (ex), lat. ex. — Voir une autre possibilité § 101.

Tout se passe comme si le subjonctif présent était formé par l’union du thème verbal et de içem իցեմ : beriçem րերիցեմ « que je porte » de *berēçem, ancien *bere-yçem ; layçem լայցեմ « que je pleure », guçem գուցեմ « que je sois », de *go-yçem. Tout serait clair si l’on admet que, dans cet ancien *berey-çem, d’où beri-çem բերի-ցեմ, on est en présence de l’élargissement *-ske- –ցե– à l’ancienne forme de l’optatif, et que beriçem րերիցեմ est comparable à φέροιμι (pheroimi), à l’élargissement près. Les présents en -i- –ի– fléchissent leur subjonctif aussi en -i- –ի– : beriçim բերիցիմ « que je sois porté » ; les présents en -u- –ու– fléchissent le leur en -u- –ու–, ainsi aṙnuçum առնուցում « que je prenne » de aṙnum առնում, le tout sous l’influence de l’indicatif présent ; le u ու