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nominatif-accusatif, des raisons de sens peuvent entraîner l’emploi de formes d’autres cas, ainsi le génitif dans hawr-etbayr հաւր-եղրայր πατράδελφος (patradelphos) ; l’instrumental dans jerb-a-kal ձերբ—ա—կալ « prisonnier » (pris par la main), l’accusatif pluriel dans bans-arku րանս—արկու « délateur » (jeteur de paroles) ; etc.

La répétition d’un adjectif suivant les règles de la composition fournit un superlatif absolu, mec-a-mec մեծ—ա—մեծ « très grand ». — Des composés avec le mot goyn գոյն, emprunté à l’iranien, servent à exprimer le comparatif, mais le positif seul suivi de k‘an քան, de la préposition z զ et de l’accusatif suffit à indiquer le sens du comparatif : « plus grand que moi » se dit mecagôyn k‘an zis մեծագոյն քան զիս, et, le plus souvent, mec k‘an zis մեծ քան զիս.

Sur le détail des faits de composition, cf. M. S. Լ. XVIII, p. 245 sq.

II. NOMS DE NOMBRE.

70. — Le nom de nombre « un » est mi մի c’est-à-dire *sm-iyo- dérivé de i.-e. *sem- représenté par gr. εἶς, μία (eis, mia). — L’ordinal correspondant est aṙaǰin առաչին, dérivé en -in —ին de aṙaǰ առաչ « devant », dont l’élément radical est aṙ առ « près de », cf. gr. παρα, περι, προ, πρῶτος (para, peri, pro, prôtos), etc.

Les noms « deux », « trois » et « quatre » étaient fléchis en indo-européen et sont restés fléchis en arménien :

erku երկու « deux » répond à homér. δύω (duô), etc. (§ 22) ; en sa qualité d’ancien duel, il n’a pas reçu le -k‘ —ք du nominatif pluriel ; mais il se fléchit d’ailleurs : acc. loc. erkus երկուս, gén. dat. abl. erkuç երկուց ; une forme erko- երկո— qui répond à gr. δύο est conservée dans erko-tasan երկո—տասան « 12 » ; erki-, au premier terme du composé indo-européen erkeam երկեամ « de deux ans » répond au premier terme skr. dvi-, gr. δι (di), lat. bi- (bi-pes, etc.), des composés ;

erek‘ երեք « trois » répond à skr. trâyah, v. sl. trĭje, gr. τρεῖς (treis) ; acc. (loc.) eris երի, à skr. trīn, got. Þrins, etc. (v. § 5, 1o) ; toute la flexion est en -i- —ի— ; le premier terme de composé eri- répondant à skr. tri-, gr. τρι- (tri-) est conservé dans ere-am երե-ամ « de trois ans » ;