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à côté de la volière. J’arrivais, et le rire du garçon éclatait… J’ai suivi de loin ton existence, et participé intérieurement à des souffrances que j’ai devinées. Je t’ai comprise enfin. C’est un vieux mot, un mot de notre temps, de la bonne école romantique. Il exprime tout ce que je veux dire et je le garde[1].

Elle aussi, Laure Le Poittevin, restait fidèle à ce passé ; et son respect attendri pour les enthousiasmes et les rêves d’autrefois, l’influence profonde exercée sur elle par son frère et son ami, se retrouvent dans l’éducation qu’elle donnait à son fils Guy, jusque dans ces lectures de Shakespeare qu’elle lui faisait faire, dans cette passion pour les vers et particulièrement pour le théâtre qu’elle lui inspira, dans les premiers essais littéraires qu’elle tint à diriger elle-même.

Il est facile de deviner à quelles souffrances Flaubert fait allusion dans les dernières lignes de sa lettre à Mme  de Maupassant ; et nous savons aujourd’hui quelle fut cette existence qu’il avait suivie de loin et qu’il venait de comprendre.

À vingt-cinq ans, en 1846, Laure Le Poittevin avait épousé Gustave de Maupassant. Ce fut un mariage d’amour. Laure était d’une grande beauté et Gustave de Maupassant très séduisant : il tenait de sa grand’mère, une créole de l’île Bourbon, ces

  1. Correspondance de Flaubert, tome III, p. 273.