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leur principe commun

est relativement débile chez lui. Ce style, cet élan de l’ordre intérieur, est dominé chez Victor Hugo par les sollicitations du vocabulaire. Ce sanguin ne fut, à cet égard, qu’un paquet de nerfs. Son génie verbal nous témoigne d’un mode de sensibilité aussi féminine que celle d’un lakiste ou d’un lamartinien. Mis au centre de tout comme un écho sonore, il achève la preuve de cette vérité que le Romantisme entraîna chez les mieux organisés un changement de sexe.

La transformation ne fut qu’intellectuelle pour Hugo. Pour d’autres elle atteignit au principe du sentiment et de la vie. Chateaubriand différa-t-il d’une prodigieuse coquette ? Musset, d’une étourdie vainement folle de son cœur ? Baudelaire, Verlaine ressemblaient à de vieilles coureuses de sabbat ; Lamartine, Michelet, Quinet furent des prêtresses plus ou moins brûlées de leur Dieu.

Ni Ronsard, ni Corneille, ni Molière, ni La Fontaine, ni même ce tendre et lucide Jean Racine ne prêtent, par leur art, au travesti qui va si bien aux maîtres romantiques. Nous avons relevé à chaque instant les larcins de Renée Vivien ou de Lucie Mardrus aux Fleurs du mal et aux Fleurs de bonne volonté. Mais, ayant pressé l’analyse, nous voici maintenant réduit à constater qu’elles ne faisaient guère que reprendre leur bien. Leurs modèles les avaient, plus ou moins, volées de sexe. Ils s’étaient mis à écrire et à penser comme il est naturel que pense et écrive une femme. Depuis qu’il retombe en quenouille, le romantisme est rendu à ses ayants droit.