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renée vivien

sion en prose de Renée Vivien, document qui montre que le poète romantique se double heureusement d’un traducteur exact : « Les femmes de la Crète dansent en rythme, de leurs pieds délicats, autour du glorieux autel, foulant la fine et tendre fleur de l’herbe. » Voilà ce que disait Sapho. Telle est la verge droite, et pure à laquelle l’enfant de Baudelaire enlace les bandelettes, le feuillage et les fleurs maléficieuses :

De leurs tendres pieds les femmes de la Crète
Ont pressé la fleur de l’herbe du printemps.
Je les vis livrer à la brise inquiète
             Leurs cheveux flottants,


Leur robes avaient l’ondoiement des marées ;
Elles ont mêlé leurs chants de clairs appels
En rythmant le rire et les danses sacrées
             Autour des autels.

Chapelain, qui faisait remarquer au jeune Racine que l’on ne pêche point de tritons dans la Seine, observerait ici que les bords de la Crète et les bords lesbiens ne connurent pas les marées. Cependant la peinture est vivante. Elle a couleur et âme. Mais combien l’on regrette « la fine et tendre fleur de l’herbe » !

Sapho dit : « Au-dessus (de la tombe) du pêcheur Pélagon, son père Méniskos plaça la nasse et la rame, en souvenir d’une vie infortunée. » Renée Vivien a écrit là-dessus quelques strophes élégiaques où la vie du marin, tout d’abord déplorée, se trouve ensuite exaltée et magnifiée : en effet, Pélagon aura gonflé sa poitrine du « vent du large » ; il aura « bu