Page:Maurice Maeterlinck - L'intelligence des fleurs, 1922.djvu/161

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
149
L’INQUIÉTUDE DE NOTRE MORALE

l’excès actuel et contraire n’est pas aussi aveugle. L’énorme développement qu’ont pris dans la pratique de notre vie certaines lois mécaniques et scientifiques, nous fait accorder au bon sens une prépondérance à quoi il reste à prouver qu’il ait droit. La logique apparemment irréductible, mais peut-être illusoire, de quelques phénomènes que nous croyons connaître, nous fait oublier l’illogisme possible de millions d’autres phénomènes que nous ne connaissons pas encore. Les lois de notre bon sens sont le fruit d’une expérience insignifiante quand on la compare à ce que nous ignorons. « Il n’y a pas d’effet sans cause », dit notre bon sens, pour prendre l’exemple le plus banal. Oui, dans le petit cercle de notre vie matérielle, cela est incontestable et suffisant. Mais dès que nous sortons de ce cercle infime, cela ne répond plus à rien, attendu que les notions de cause et d’effet sont l’une et l’autre inconnaissables dans un monde où tout est inconnu. Or, notre vie,