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Tout le monticule où, avec sa tête, avec ses épaules, avec ses coudes, ses genoux et ses pieds, il creusait sa taupinière, s’effondra. Étaient-ce ses manœuvres qui avaient provoqué la débâcle ? Était-ce l’ennemi qui, surveillant et constatant les progrès du cheminement vers l’issue, avait démoli d’un coup de pioche l’édifice fragile ? Toujours est-il que Raoul se sentit écrasé de toutes parts, étouffé, perdu.

Il résista. Il s’arc-bouta de nouveau. Il retint son souffle. Il épargna l’air qui lui restait. Mais c’est à peine s’il pouvait soulever sa poitrine et respirer sous le poids qui l’oppressait.

Il pensa encore :

« J’en ai pour quinze minutes… Si, dans quinze minutes… »

Il compta les secondes. Mais bientôt ses tempes se mirent à battre, ses idées tourbillonnèrent dans le délire, il ne sut pas ce qui se passait.

Il se retrouva sur son lit, dans l’ancienne chambre qu’il occupait au manoir. Quand il ouvrit les yeux, il constata qu’il était tout habillé, que Catherine et Bertrande le regardaient anxieusement, et que la pendule marquait sept heures trois quarts. Il chuchota :

« Quinze minutes… pas davantage, hein ? Sans quoi… »

Il entendit la voix de Béchoux qui ordonnait :

« Vite, Arnold, courez au pavillon et rapportez sa valise. Charlotte, une tasse de thé et des biscottes, et au galop, n’est-ce pas ? »

Et, revenant au lit, Béchoux lui dit :

« Il faut manger, mon vieux… Pas trop… mais il le faut… Ah ! sacrebleu, tu nous en as fait une frousse ! Qu’est-ce qu’il t’est donc arrivé ? »

Catherine et Bertrande, le visage décomposé, pleuraient. Chacune d’elles prit une de ses mains.

Bertrande murmura :