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venait de disparaître avec le marquis de Cazolles, et quittant brusquement Norbert de Varenne, il se mit à la poursuite de la jeune fille.

Une cohue épaisse qui voulait boire l’arrêta. Comme il l’avait enfin franchie, il se trouva nez à nez avec le ménage de Marelle.

Il voyait toujours la femme ; mais il n’avait pas rencontré depuis longtemps le mari, qui lui saisit les deux mains : — Que je vous remercie, mon cher, du conseil que vous m’avez fait donner par Clotilde. J’ai gagné près de cent mille francs avec l’emprunt marocain. C’est à vous que je les dois. On peut dire que vous êtes un ami précieux.

Des hommes se retournaient pour regarder cette brunette élégante et jolie. Du Roy répondit : — En échange de ce service, mon cher, je prends votre femme, ou plutôt je lui offre mon bras. Il faut toujours séparer les époux.

M. de Marelle s’inclina : — C’est juste. Si je vous perds, nous nous retrouverons ici dans une heure.

— Parfaitement.

Et les deux jeunes gens s’enfoncèrent dans la foule, suivis par le mari. Clotilde répétait : — Quels veinards que ces Walter. Ce que c’est tout de même que d’avoir l’intelligence des affaires.

Georges répondit : — Bah ! Les hommes forts arrivent toujours, soit par un moyen, soit par un autre.

Elle reprit : — Voilà deux filles qui auront de vingt à trente millions chacune. Sans compter que Suzanne est jolie.

Il ne dit rien. Sa propre pensée sortie d’une autre bouche l’irritait.

Elle n’avait pas encore vu « Jésus marchant sur les flots ». Il proposa de l’y conduire. Ils s’amusaient à dire