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BERTHE. 261

J'eus un sursaut d'étonnement, et je m'é- criai :

— Marier Berthe ?. . . mais c'est impossible ! H reprit :

— Oui... je sais... mais réfléchissez... docteur... c'est que... peut-être.... nous avons espéré... si elle avait des enfants... ce serait pour elle une grande secousse, un grand bonheur et. . . qui sait si son esprit ne s'éveillerait pas dans la maternité?...

Je demeurai fort perplexe. C'était juste. II se pourrait que cette chose si nouvelle, que cet admirable instinct des mères qui palpite au cœur des bêtes comme au cœur des femmes, qui fait se jeter la poule en face de la gueule du chien pour défendre ses petits, amenât une révolution, un bouleversement dans cette tête inerte, et mît en marche le mécanisme immobile de sa pensée.

Je me rappelai d'ailleurs tout de suite un exemple personnel. J'avais possédé, quelques années auparavant, une petite chienne de chasse si sotte que je n'en pouvais rien obte- nir. Elle eut des petits et devint, du jour au lendemain, non pas intelligente, mais pres- que pareille à beaucoup de chiens peu déve- loppés.