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des jours entiers ou bien s’enfermait en sa chambre, et lisait ou méditait.

Plus l’heure du mariage avançait, plus il devenait ombrageux.

Une semaine environ avant la date fixée, le fiancé, qui revenait un soir de sa visite quotidienne à la jeune fille, reçut un coup de fusil à bout portant, au coin d’un bois. Des paysans, qui le trouvèrent au jour levant, rapportèrent le corps à son logis. Son frère s’abîma dans un désespoir fougueux qui dura deux ans. On crut même qu’il se ferait prêtre ou qu’il se tuerait.

Au bout de ces deux années de désespoir, il épousa la fiancée de son frère.

Cependant on n’avait pas trouvé le meurtrier. Aucune trace certaine n’existait ; et le seul objet révélateur était un morceau de papier presque brûlé, noir de poudre, ayant servi de bourre au fusil de l’assassin. Sur ce lambeau de papier, quelques vers étaient imprimés, la fin d’une chanson, sans doute, mais on ne put découvrir le livre dont cette feuille était arrachée.