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la voiture, deux vignerons revenant du travail, portant la binette sur l’épaule et marchant du long pas fatigué des ouvriers.

Les petites Oriol rougirent jusqu’aux tempes. C’étaient leur père et leur frère, qui retournaient aux vignes comme jadis, passaient des jours à suer sur la terre qui les avait enrichis, et courbés, la croupe au soleil, la retournaient du matin au soir pendant que les belles redingotes, pliées avec soin, se reposaient dans la commode, et les grands chapeaux dans une armoire.

Les deux paysans saluèrent avec un sourire d’amitié tandis que toutes les mains dans le landau répondaient à leur bonsoir.

Dès qu’on fut revenu, comme Gontran descendait de l’arche pour monter au Casino, Brétigny l’accompagna, et, l’arrêtant dès les premiers pas :

— Écoute, mon cher, ce que tu fais n’est pas bien et j’ai promis à ta sœur de t’en parler.

— Me parler de quoi ?

— De ta façon d’agir depuis quelques jours.

Gontran avait pris son air impertinent :

— D’agir ? Envers qui ?

— Envers cette petite que tu lâches salement.