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père nourricier de la machine entière, son régulateur et son magasin de vie.

Il affirmait qu’à son gré, rien que par le régime, il pouvait rendre les gens gais ou tristes, capables de travaux physiques ou de travaux intellectuels, selon la nature de l’alimentation qu’il leur imposait. Il pouvait même agir sur les facultés cérébrales, sur la mémoire, sur l’imagination, sur toutes les manifestations de l’intelligence. Et il terminait, en plaisantant, par ces mots :

— Moi, je soigne par le massage et le curaçao.

Il disait merveille du massage, et parlait comme d’un dieu du Hollandais Hamstrang, qui accomplissait des miracles. Puis, montrant ses mains fines et blanches :

— Avec ça on peut ressusciter des morts.

Et la duchesse ajoutait :

— Le fait est qu’il masse dans la perfection.

Il préconisait aussi les alcools en petites proportions pour exciter l’estomac à certains moments ; et il faisait des mélanges, savamment combinés, que la duchesse devait boire, à heures fixes, soit avant, soit après ses repas.

On le voyait chaque jour arriver au Café du Casino, vers neuf heures et demie, et demander ses bouteilles. On les lui apportait