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Gontran murmura d’un air hautain :

— Dites à des juifs.

— Soit, à des Juifs, bien qu’il y ait dans le nombre un marguillier de Saint-Sulpice qui s’est servi d’un prêtre comme intermédiaire entre lui et vous… mais je ne chicanerai pas pour si peu… Vous devez donc à divers usuriers, israélites ou catholiques, à peu près autant. Mettons cent cinquante mille, au bas mot. Cela fait un total de trois cent quarante mille francs dont vous payez les intérêts en empruntant toujours, sauf pour les miens, que vous ne payez point.

— C’est juste, dit Gontran.

— Alors, il ne vous reste plus rien.

— Rien, en effet… que mon beau-frère.

— Que votre beau-frère, qui en a assez de vous prêter de l’argent.

— Alors ?

— Alors, mon cher, le moindre paysan logé dans une de ces huttes, là-bas, est plus riche que vous.

— Parfaitement… et après ?

— Après… après… Si votre père mourait demain, il ne vous resterait plus, pour manger du pain, entendez-vous, qu’à accepter une place d’employé dans ma maison. Et ce serait encore là un moyen de déguiser la pension que je vous ferais.