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trevents, je croisai les rideaux, je pendis un paletot sur un filet de lumière qui passait encore ; puis, les mains étendues pour ne pas tomber sur les chaises, le cœur palpitant, je la cherchai, je la trouvai.

Ce fut un nouveau voyage, à deux, à tâtons, les lèvres unies, vers l’autre coin où se trouvait mon alcôve. Nous n’allions pas droit, sans doute, car je rencontrai d’abord la cheminée, puis la commode, puis enfin ce que nous cherchions.

Alors j’oubliai tout dans une extase frénétique. Ce fut une heure de folie, d’emportement, de joie surhumaine ; puis, une délicieuse lassitude nous ayant envahis, nous nous endormîmes, aux bras l’un de l’autre.

Et je rêvai. Mais voilà que dans mon rêve il me sembla qu’on m’appelait, qu’on criait au secours ; puis je reçus un coup violent ; j’ouvris les yeux !…

Oh !… Le soleil couchant, rouge, magnifique, entrant tout entier par ma fenêtre grande ouverte, semblait nous regarder du bord de l’horizon, illuminait d’une lueur d’apothéose mon lit tumultueux, et, couchée dessus, une femme éperdue, qui hurlait, se débattait, se tortillait, s’agitait des pieds et des mains pour saisir un bout de drap, un coin de rideau, n’im-