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Qu’est-ce qui constitue le héros, selon l’acception ancienne de ce mot démodé ? Suffit-il d’être brave, très brave, téméraire ? D’être bon et dévoué jusqu’à la dernière abnégation ? Non certes. Sauf les très rares exceptions de lâcheté native et inguérissable, tout homme peut être très brave à un moment donné, quitte à ne plus l’être le lendemain. La bravoure, fréquemment, dépend de l’estomac, qui règle l’état de l’esprit. On est souvent capable, après dîner, d’un acte téméraire qu’on n’aurait pas osé à jeun. Qui donc, souffrant d’un violent malaise, risquera sa vie pour sauver quelqu’un ? Qui donc, dans l’excitation de l’appétit satisfait reculerait devant un péril, même excessif ?