Page:Maupassant - Le Préjugé du déshonneur, paru dans Le Gaulois, 26 mai 1881.djvu/2

Cette page a été validée par deux contributeurs.


LE
PRÉJUGÉ DU DÉSHONNEUR



Sous cette rubrique : « Les Drames de l’adultère », les journaux, nous apprennent tous les jours qu’un mari trompé vient de massacrer sa femme ou l’amant, ou tous les deux.

Ces égorgements nous laissent froids. Les jurés, tous maris, sont pleins d’indulgence pour ces fureurs d’époux outragés ; ils acquittent le meurtrier, et l’assistance très spéciale des cours d’assises, lecteurs de romans-feuilletons, public de l’Ambigu, venu pour l’émotion, gonflé de sensiblerie larmoyante, applaudit à ce verdict, jugeant que le mari trompé a lavé son honneur dans le sang, qu’il s’est réhabilité par le meurtre !

C’est avec ces grands mots qu’on nous élève, avec ces préjugés qu’on nous instruit, avec ces idées qu’on nous prépare au mariage.

Je suis pour la femme qui tombe contre le mari qui tue.