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Je suis pour la femme qui tombe contre le mari qui tue !



Pourquoi tue-t-il ? Parce qu’il se croit déshonoré !

Nous touchons ici à un de ces préjugés prodigieux qui servent généralement de bases à toutes nos croyances.

Êtes-vous déshonoré parce que votre bonne vous a volé ? — Non. — Et vous l’êtes parce que votre femme vous a trompé ?! — Vous, le volé ! le trompé ! le lésé ! le filouté enfin ! vous vous considérez comme déshonoré tant que vous n’aurez pas lardé de coups de couteau l’amant que tout le monde considère comme honorable, comme accomplissant légitimement ses fonctions d’homme séducteur, et la femme qui s’est abandonnée, séduite, entraînée. Que la logique est une belle chose ! Mais, sacrebleu ! le déshonneur ne peut résulter que d’un acte essentiellement personnel, et ne peut provenir en aucun cas du fait d’un autre.