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L’AMI JOSEPH

titions établies à la surface du globe. Il disait : « Votre Dieu, Monsieur, est de ceux qu’il faut respecter, mais aussi de ceux qu’il faut discuter. Le mien s’appelle Raison : il a été de tout temps l’ennemi du vôtre… »

Les Méroul, désespérés, s’efforçaient de détourner les idées. Le curé partit de très bonne heure.

— Alors le mari prononça doucement :

— Tu as peut-être été un peu loin devant ce prêtre ?

Mais Joseph aussitôt s’écria :

— Elle est bien bonne, celle-là ! Avec ça que je me générais pour un calotin ! Tu sais, d’ailleurs, tu vas me faire le plaisir de ne plus m’imposer ce bonhomme-là pendant les repas. Usez-en, vous autres, autant que vous voudrez, dimanches et jours ouvrables, mais ne le servez pas aux amis, saperlipopette !

— Mais, mon cher, son caractère sacré…

Joseph Mouradour l’interrompit :

— Oui, je sais, il faut les traiter comme des rosières ! Connu, mon bon ! Quand ces gens-là respecteront mes convictions, je respecterai les leurs !