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méthode de séchage le demandaient avant leur mort, et ils resteront éternellement alignés sous ces voûtes sombres, à la façon des objets qu’on garde dans les musées, moyennant une rétribution annuelle versée par les parents. Si les parents cessent de payer, on enfouit tout simplement le défunt, à la manière ordinaire.

J’ai voulu visiter aussitôt cette sinistre collection de trépassés.

À la porte d’un petit couvent d’aspect modeste, un vieux capucin, en robe brune, me reçoit et il me précède sans dire un mot, sachant bien ce que veulent voir les étrangers qui viennent en ce lieu.

Nous traversons une pauvre chapelle, et nous descendons lentement un large escalier de pierre. Et, tout à coup, j’aperçois devant nous une immense galerie, large et haute, dont les murs portent tout un peuple de squelettes habillés d’une façon bizarre et grotesque. Les uns sont pendus en l’air côte à côte, les autres couchés sur cinq tablettes de pierre, superposées depuis le sol jusqu’au plafond. Une ligne de morts est debout par terre, une ligne compacte, dont les têtes affreuses semblent parler. Les unes sont rongées par des végétations hideuses qui dé-