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s’agitent, vêtus de rouge, de bleu, de vert : c’est charmant et naïf. Elles sont chez elles, chez leur saint, dont elles ont paré la demeure, — car Dieu est trop loin pour leur esprit borné, trop grand pour leur humilité.

Elles ne se tournent pas vers La Mecque, elles, mais vers le corps du marabout, et elles se mettent sous sa protection directe, qui est encore, qui est toujours la protection de l’homme. Leurs yeux de femmes, leurs yeux doux et tristes, soulignés par deux bandeaux blancs, ne savent pas voir l’immatériel, ne connaissent que la créature. C’est le mâle qui, vivant, les nourrit, les défend, les soutient ; c’est encore le mâle qui parlera d’elles à Dieu, après sa mort. Elles sont là tout près de la tombe parée et peinturlurée, un peu semblable à un lit breton mis en couleur et couvert d’étoffes, de soieries, de drapeaux, de cadeaux apportés.

Elles chuchotent, elles causent entre elles, et racontent au marabout leurs affaires, leurs soucis, leurs disputes, les griefs contre le mari. C’est une réunion intime et familière de bavardages autour d’une relique.

Toute la chapelle est pleine de leurs dons bizarres : de pendules de toutes grandeurs qui