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LA MAIN GAUCHE.

gné cette épouvantable maladie, monsieur. Je l’ai sauvé, mais je suis défigurée. Je lui ai donné ma beauté, à mon pauvre enfant. Enfin, j’ai fait mon devoir, ma conscience est tranquille. Si je souffre, il n’y a que Dieu qui le sait.

Le docteur avait tiré de sa poche un mince pinceau d’aquarelliste.

— Laissez faire, dit-il, je vais vous arranger tout cela.

Elle tendit sa joue droite et il commença à la toucher par coups légers, comme s’il eut posé dessus de petits points de couleur. Il en fit autant sur la joue gauche, puis sur le menton, puis sur le front ; puis il s’écria :

— Regardez, il n’y a plus rien, plus rien !

Elle prit la glace, se contempla longtemps avec une attention profonde, une attention aiguë, avec un effort violent de tout son esprit, pour découvrir quelque chose, puis elle soupira :

— Non. Ça ne se voit plus beaucoup. Je vous remercie infiniment.

Le médecin s’était levé. Il la salua, me fit sortir puis me suivit ; et, dès que la porte fut refermée :