Page:Maupassant - L’Inutile Beauté, OC, Conard, 1908.djvu/184

Cette page n’a pas encore été corrigée

au matin dans un état qu’on ne se figure pas. Voyez-vous, c’est le regret qui le conduit là et qui lui fait mettre une figure de carton sur la sienne. Oui, le regret de n’être plus ce qu’il a été, et puis de n’avoir plus ses succès !

Il dormait maintenant, et commençait à ronfler. Elle le contemplait d’un air apitoyé, et elle reprit :

— Ah ! il en a eu des succès, cet homme-là ! Plus qu’on ne croirait, monsieur, plus que les plus beaux messieurs du monde et que tous les ténors et que tous les généraux.

— Vraiment ? Que faisait-il donc ?

— Oh ! ça va vous étonner d’abord, vu que vous ne l’avez pas connu dans son beau temps. Moi, quand je l’ai rencontré, c’était à un bal aussi, car il les a toujours fréquentés. J’ai été prise en l’apercevant, mais prise comme un poisson avec une ligne. 11 était gentil, monsieur, gentil à faire pleurer quand on le regardait, brun comme un corbeau, et frisé, avec des yeux noirs aussi grands que des fenêtres. Ah ! oui, c’était un joli garçon. Il m’a emmenée ce soir-là, et je ne l’ai plus quitté, jamais, pas un jour, malgré tout ! Oh ! il m’en a fait voir de dures !