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L’Empire arrive ; ce cabotin, Napoléon, joue les drames sur les champs de bataille ; et la France enthousiasmée bat des mains. Il la ruine, l’épuise, la tue, mais il joue bien, ce cabotin de génie ; et elle se laisse ruiner, elle donne son argent, ses enfants, tout, en des élans d’enthousiasme furieux. Il sort vaincu de la patrie abattue, mourante, exténuée par lui. Le calme semble revenir ; mais il n’a qu’à se remontrer pour que l’enthousiasme reparaisse plus frénétique que jamais, et pour que le pays se rue à de nouvelles et sanglantes aventures derrière son acteur favori.

Toute notre politique de sentiment qui a fait de nous les chevaliers errants de l’Europe, ces Don Quichotte toujours partis au secours du persécuté, ne vient que de nos constants accès d’enthousiasme.