Page:Maupassant - Contes du jour et de la nuit 1885.djvu/138

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ché par les valseuses, et il inspirait aux hommes cette inimitié souriante qu’on a pour les gens de figure énergique. On lui avait soupçonné quelques amours capables de donner fort bonne opinion d’un garçon. Il vivait heureux, tranquille, dans le bien-être moral le plus complet. On savait qu’il tirait bien l’épée et mieux encore le pistolet.

— Quand je me battrai, disait-il, je choisirai le pistolet. Avec cette arme, je suis sûr de tuer mon homme.

Or, un soir, comme il avait accompagné au théâtre deux jeunes femmes de ses amies, escortées d’ailleurs de leurs époux, il leur offrit, après le spectacle, de prendre une glace chez Tortoni. Ils étaient entrés depuis quelques minutes, quand il s’aperçut qu’un monsieur assis à une table voisine regardait avec obstination une de ses voisines. Elle semblait gênée, inquiète, baissait la tête. Enfin elle dit à son mari :

— Voici un homme qui me dévisage. Moi, je ne le connais pas ; le connais-tu ?