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aller. Mais Saint-Antoine l’arrêta d’un tour de poignet, et lui posant ses deux mains puissantes sur les épaules il le rassit si durement que la chaise s’écrasa sous l’homme.

Une gaieté de tempête éclata ; et Antoine, radieux, ramassant son cochon, fit semblant de le panser pour le guérir, puis il déclara : « Puisque tu n’veux pas manger, tu vas boire, nom de Dieu ! » Et on alla chercher de l’eau-de-vie au cabaret.

Le soldat roulait des yeux méchants : mais il but néanmoins ; il but tant qu’on voulut ; et Saint-Antoine lui tenait la tête, à la grande joie des assistants.

Le Normand, rouge comme une tomate, le regard en feu, emplissait les verres, trinquait en gueulant « à la tienne ! » Et le Prussien, sans prononcer un mot, entonnait coup sur coup des lampées de cognac.

C’était une lutte, une bataille, une revanche ! À qui boirait le plus, nom d’un