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LE BÛCHER.

Vasudev Madhav Samarth, interprète et secrétaire.

Les esclaves : Râmchandra Bajâji, Ganu bin Pukârain Kokate, Rhambhaji bin Favji.

Au moment de quitter sa patrie, celui qui est mort l’autre jour fut saisi d’une crise affreuse de chagrin, et, persuadé qu’il ne reviendrait pas, il voulut renoncer à ce voyage, mais il dut obéir aux volontés de son noble parent, le prince de Baroda, et il partit.

Ils vinrent passer la fin de l’été à Étretat, et on allait les voir curieusement, chaque matin, prendre leur bain à l’établissement des Roches-Blanches.

Voici cinq ou six jours, Bapu Sahib Khanderao Ghatgay fut atteint de douleurs aux gencives ; puis l’inflammation gagna la gorge et devint une ulcération. La gangrène s’y mit, et, lundi, les médecins déclarèrent à ses jeunes compagnons que leur parent allait mourir. L’agonie commença presque aussitôt, et comme le malheureux ne respirait plus qu’à peine, ses amis le saisirent, l’arrachèrent de son lit et le déposèrent sur les pavés de la chambre, afin qu’il rendît l’âme étendu sur la terre, notre mère, selon les ordres de Brahma.

Puis ils firent demander au maire, M. Boissaye, l’autorisation de brûler, le jour même, le cadavre pour obéir toujours aux formelles prescriptions de la religion hindoue. Le maire, hésitant, télégraphia à la préfecture pour solliciter des instructions, en annonçant, toutefois, qu’une absence de réponse équivaudrait pour lui à un consentement. Aucune réponse n’étant venue à 9 heures du soir, il fut donc décidé, en raison de la nature infectieuse du mal qui avait emporté l’Indien, que la crémation du corps aurait lieu la nuit même, sous la falaise, au bord de la mer, à la marée descendante.

On reproche aujourd’hui cette décision au maire