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mille peut-être, affamés, féroces, les chiens qui gardaient sur les hauts plateaux les campements des Espagnols. Leurs maîtres tués ou partis, les bêtes ont rôdé, mourant de faim; puis elles ont trouvé la ville, et elles la cernent, comme une armée. Le jour, elles dorment dans les ravins sous les roches, dans les trous de la montagne: et, sitôt la nuit tombée, elles gagnent Saïda pour chercher leur vie.

Les hommes qui rentrent tard chez eux marchent 1e revolver au poing, suivis, flairés par vingt ou trente chiens jaunes pareils à des renards.

Ils aboient à présent d'une façon continue, effroyable, à rendre fou. Puis d'autres cris s'éveillent, des glapissernents grêles; ce sont les chacals qui arrivent; et parfois on n'entend plus qu'une voix plus forte et singulière, celle de l'hyène, qui imite le chien pour l'attirer et le dévorer.

Jusqu'au jour dure sans repos cet horrible vacarme. Saïda, avant l'occupation française était protégée par une petite forteresse édifiée par Abd-el-Kader.

La ville nouvelle est dans un fond, entourée de hauteurs pelées. Une mince rivière, qu'on