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- Mais oui, mon bon, ou du moins il y en a tant de teintes, et si bien teintes, qu'on ne les distingue plus des vraies, et que les meilleurs amateurs s'y trompent. Elles sont devenues rares comme des bibelots authentiques, et on n'est jamais sûr de ce qu'on embrasse.

- Mais non, mais non. Elles ont des grâces que ne possèdent pas les brunes. La nuque par exemple. Connais-tu quelque chose de plus joli au monde que la petite mousse des courts cheveux, des premiers cheveux dorés ou châtains avec des luisants d'acajou, sur la peau blanche du cou qui descend se fondre dans l'épaule? Les brunes ont l'air dur, ce sont les guerrières de l'amour. Regarde celle-là. On dirait l'Amazone de la coquetterie. Te souviens-tu de la démarche lente et des attitudes tendres d'Henriette?

- Parbleu, elle faisait son métier, elle.

Après un instant de réflexion, Mariolle ajouta:

- N'importe, si elle avait été un peu moins canaille, ou moi un peu plus, nous aurions formé un couple inséparable.

Plusieurs hommes les ayant aperçus, s'avançaient la main tendue. Ce n'était que: "Bonjour, Mariolle. - Tiens, vous voilà? - Comment allez-vous? - Quand êtes-vous arrivé? Vous quittez donc aussi Paris, vous?"

Et Mariolle serrait ces mains, souriait, répondait qu'il se portait à merveille, et qu'il venait faire un peu la fête à Aix.

Un d'eux soudain, un Italien très noble, ruiné et coureur de villes d'eaux, le marquis Pimperani, lui demanda:

- Vous connaissez la princesse de Guerche?

- Oui, je chasse et dîne même quelquefois chez elle.